Entretien
avec un vampire
Vampires en toute intimité
Film charnière dans la carrière de Peter Jackson, Fantômes contre fantômes est une comédie d’horreur qui parvient sans forcer à concilier coup de flip et éclats de rire.
Synopsis : Malloy collection les vies. Avec son dictaphone il enregistre les histoires que des inconnus lui racontent. Un soir il croise la route de Louis qui lui raconte l’histoire sanguinaire d’un vampire qui a près de deux siècles.
J’aime bien les loups-garous avec leurs poiles et leurs grandes dents, je ne hais point les morts-vivants malgré leur esprit trop monomaniaque mais ceux que je préfère, ceux que j’aime vraiment et qui me rendent tout chose ce sont les vampires. Pas n’importe quels suceurs de sangs néanmoins ; pour gagner mes faveurs ils doivent être aristocratiques, bien habillés, d’autant plus cruels que raffinés et si possible vieux, plus ils sont anciens mieux c’est, un rien décadents ça ne fait pas de mal non plus. Cette inclinaison vient d’Entretien avec un vampire, l’adaptation du roman d’Ann Rice par l’Irlandais Neil Jordan (voir la critique de Byzantium son autre film de vampires). A la suite de ce film je devais passer une partie de mon adolescence à explorer ce monde merveilleux et furieux, plein de sexe et de morts et d’amours plus ou moins déviants. Je suis même allé voir à sa sortie La reine des damnées le film de Michael Rymer avec Stuart Townsend (Lestat) et Aaliyah la chanteuse qui n’eut pas le temps de devenir actrice pour cause de décès prématuré, dans le rôle d’Akasha, la mère des vampires, la reine des damnées, mais c’est une autre histoire qu’on traitera peut-être ailleurs. Et même si au fil des ans je me suis éloigné des vampires d’Ann Rice la perspective de les voir apparaître dans une série télé ne me déplait pas du tout.
|
Entretien avec un vampire, pour revenir à nos suceurs de sang, est une continuation de la Hammer par d’autres moyens. Des vampires aristos, beaux comme le diable, des costumes d’époque dans une atmosphère gothique et romantique. Quelque chose de sexy aussi on est très loin de la laideur d’un Nosferatu. Les vénérables studios anglais ont été une influence visuelle mais il s’agit là des fondations. Entretien avec un vampire n’est pas un hommage car il donne la parole à celui qui en principe est l’antagoniste, le vampire, ce que ne faisait pas la Hammer. Malgré tout son charisme Christopher Lee (Cauchemar de Dracula, Dracula, prince des ténèbres…)) n’est pas le héros, ni même le personnage principal même quand le film s’appelle Dracula quelque chose et qu’il est le comte à l’insatiable soif de sang. Le vampire est l’ennemi, l’être maléfique qu’il faut abattre. Le point de vue adopté dans les films de vampires est celui de la victime ou du chasseur qui armé de sa foi, de son crucifix, d’eau bénite et d’un pieu en bois cherche à détruire la créature malveillante. Neil Jordan, à la suite d’Ann Rice, offre une voix aux vampires, en l’occurrence à Louis (Brad Pitt) qui nous raconte sa vie et ses états d’âme, ce malheur dans lequel il se complait. Le récit a une saveur autobiographique qui n’est pas désagréable et il donne la parole à la défense. Ces vampires sont de vrais personnages pas de simples antagonistes incarnation d’un principe, le Mal.
Michael J. Fox, est donc Frank Bannister cet authentique médium qui fait de faux exorcismes grâce à la Sorti en 1994 Entretien avec un vampire systématise ce que le Dracula de Francis Ford Coppola avait ébauché dans son prologue, humanisé le vampire en lui donnant une raison d’être tel qu’il est. Le vampire devient autre chose que le méchant qui est méchant parce qu’il n’est pas gentil. En humanisant les vampires Entretien avec un vampire ne les rend pas moins mauvais le film leur donne simplement plus d’épaisseur. Les vampires que l’on voit à l’écran ne sont pas gentils, ce sont des tueurs, ce ne sont pas non plus des héros incompris même s’ils peuvent susciter l’envie et la convoitise, l’être humain n’aime pas l’idée qu’il est mortel.
Les amateurs et amatrices de scènes choques ne sont pas oubliées et il ne faudrait pas croire que Jordan a juste tourné un film plein de vampires bien habillés qui ne font que philosopher sur la nature du Bien et du Mal et sur le sens de la vie éternelle. Entretien avec un vampire est un film d’horreur qui ne manque pas de scènes explicites. Qu’elles proviennent de Lestat (Tom Cruise) qui prend un malin plaisir à tuer et aussi occasionnellement à voir souffrir ses victimes, de Claudia (fascinante Kirsten Dunst) qui malgré sa taille, elle reste coincée dans son corps de petite fille, est une tueuse insatiable et il y a le spectacle des vampires parisiens. A peu près tout ce que font les vampires de la capitale françaises les classes dans la catégorie des grands salopards du cinéma. La violence n’est pas exempte du récit de Louis bien qu’on pourrait le soupçonner d’être, sur son compte, pas tout à fait franc sur les trucs moches que lui-même a fait (il y en a évidemment plus dans le livre) mais on peut aussi apprécier que Louis ne soit pas le plus fiable des témoins. Qu’il peut se montrer de mauvaise foi.
|
Tom Cruise avec ce film montre qu’il est aussi capable de jouer les vilains, d’être un bon méchant de cinéma ce qu’il ne manquera pas par la suite de refaire. Son Lestat est à la fois charmeur et agaçant, beau et terrifiant, c’est un sauvage à peine recouvert du verni de la Civilisation. On pourrait presque lui trouver un caractère sadien. Ann Rice qui au départ ne voulait pas de lui, elle le jugeait trop différent de son personnage de papier, a fini par reconnaître que l’acteur avait fait du bon boulot. L’auteur est d’ailleurs satisfaite de l’adaptation ce qui n’est pas si fréquent.
L’ensemble de la distribution même les petits rôles apportent sa pierre à l’édifice. Qu’on pense à la Française Laure Marsac (Un vampire au Paradis, La reine Margot, Mesrine…) qui compose une malheureuse victime impuissante exposée sur la scène du théâtre des vampires, l’actrice incarne la peur comme on l’a rarement vu au cinéma. Qu’on songe aussi au personnage de Santiago joué par Stephen Rea (V pour Vendetta, La compagnie des loups, Underworld nouvelle ère…) et à son terrible sens de la justice, sa cruauté froide et ses manières un peu daté de comédien. Pour composer son personnage Rea s’est inspiré du jeu très théâtral de la Comédie française.
Avec Entretien avec un vampire Neil Jordan signe un film qui a marqué son époque en renouvelant l’image du vampire au cinéma et en suscitant des films réponses plus ou moins déguisés comme le Vampires de John Carpenter. En 1998 Big John tournait son film en réaction à la glamourisation du vampire et revenait au basique, ses vampires craignent les crucifix, ils sont chassés par l’Eglise catholique et redeviennent des figures du Mal. Carpenter ne fait pas pour autant un film manichéen, sa culture protestante l’empêche de peindre sous un jour trop positif l’Eglise catholique apostolique et romaine, sa filmographie est un long questionnement sur le Mal. Neil Jordan n’a pas cette obsession. Entretien avec un vampire est lui un film agnostique, Armand (Antonio Banderas) avoue qu’en plusieurs siècles passés sur Terre il n’a rien trouvé qui puisse confirmer ou infirmer l’existence de Dieu. Pire au début du film Louis explique à Malloy (Christian Slater) qu’il aime les crucifix et qu’il se plait à les admirer. Sans Dieu il n’y a pas de mal absolu ou de mal incarné mais des êtres malfaisants à qui il peut même parfois arrivé de faire le bien.
R.V.
Plus de films de vampires : Aux frontières de l'aube, Byzantium, Dracula (de Coppola), Le Bal des vampires, Le Cirque des vampires, Une nuit en enfer.
Et parce que quand on parle vampire la comtesse Bathory n'est jamais loin retrouvez-la chez la Hammer dans Comtesse Dracula.
Et parce que quand on parle vampire la comtesse Bathory n'est jamais loin retrouvez-la chez la Hammer dans Comtesse Dracula.