Re-Animator
Plus fort que la mort
Le premier film de Stuart Gordon contribua a façonné le cinéma gore des années 80 comme peu de film grâce à un mélange d’étonnant de violence graphique, de sexe macabre et d’humour noir
Réalisation : Stuart Gordon
Scénario : Dennis Paoli, William Norris et Stuart Gordon, d'après une nouvelle de H.P. Lovecraft Distribution :
Année : 1985 Synopsis : Dan Cain, étudiant boursier à l’université et à l’hôpital Miskatonic, a devant lui un avenir prometteur. Elève doué il sort avec la fille du doyen Megan Halsey, la fille du doyen. L’arrivé d’Herbert West, un nouvel étudiant qui mène des expériences dans le but de vaincre la mort va faire prendre à la vie du couple un tour des plus étranges. |
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Sans la rencontre du producteur Brian Yuzna et du réalisateur Stuart Gordon (homme de théâtre basé à Chicago) ce film culte n’aurait jamais vu le jour. Re-Animator est une adaptation de Lovecraft qui écrivit six nouvelles qui mettaient en scène le personnage d’Herbert West (ici interprété par Jeffrey Combs) savant fou aussi brillant que narcissique et amoral. Selon Lovecraft ces nouvelles étaient des parodies du Frankenstein de Mary Shelley et n’avaient à ses yeux que peu de valeur tant celles-ci s’éloignaient de ce que l’auteur aimait et souhaitait faire en matière de littérature. Ces nouvelles faites par pure intérêt commerciale offre en effet, de l’aveu même de Stuart Gordon, un matériel visuel et explicite qui tranche avec le goût de Lovecraft pour l’indicible mais qui propice à une adaptation cinématographique avec un budget limité.
Conçu comme un projet indépendant en marge du système hollywoodien le film a été tourné en 18 jours à Hollywood par un Stuart Gordon encore novice dans la réalisation cinématographique mais qui est bien entouré. Le long métrage est marqué par les expériences théâtrales du réalisateur comme des ses acteurs. La qualité de l'interprétation que ce soit celle de Jeffrey Combs (Fantômes contre fantômes), qui en fait juste assez pour irriter et captiver le spectateur, celle de Bruce Abbott parfait dans le rôle du brave type horrifié et fasciné par la tournure prise par les événements. Quant à Barbara Crampton, qui était alors une actrice de soap opera, a le droit à une scène particulièrement corsée sur laquelle nous reviendrons. Les effets spéciaux sont, toujours pour des raisons de budget, exécutés sur le plateau renforçant l'aspect théâtral du film.
Si le choix de tourner un film d’horreur est une affaire de goût pour le genre il est aussi dicté par des raisons économiques qui font qu’encore aujourd’hui ce type de films sont très rentable, pour un investissement de base minime il est possible d’attendre de grosses rentrées d’argent. Re-Animator n’est cependant pas qu’une machine à fric, un projet purement mercantile, un film d’exploitation comme il y en a tant, Gordon voulait faire le meilleur film d’horreur possible et pour cela a longuement regardé les œuvres de maître du genre comme Wes Craven et de George Romero comme celles de grands cinéastes qui se sont frottés au genre que ce soit Stanley Kubrick pour Shining ou Roman Polanski. Stuart Gordon va aussi chercher son inspiration dans la bande dessinée avec des créateurs comme Bernie Wrightson, qui s’illustra notamment, le monde est petit décidément, dans l’adaptation et la mise en images de récits lovecraftiens.
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Ce parti prit artistique et cette volonté de produire un travail de qualité font que plus de trente ans après sa sortie en salle le film a gardé sa force et son efficacité. D’autant qu'il n’est pas avare en scène choque et en moment dérangeant. Plutôt que de rire du genre, le film rit avec. Il en teste les limites et viole toute notion de bon goût. La progression dans l’horreur va si loin que la peur se dissipe au profit du rire sans pour autant que l’effroi et le dégoût, qui plus que la simple peur sont les mécaniques principales du cinéma d’épouvante, ne se dissipent. Le grotesque s’il vous arrache un éclat de rire n’empêche pas le frisson notamment devant la scène culte au cours de laquelle un personnage fraîchement décédé et réanimé se prépare à violer Megan Halsey, jouée par l’actrice Barbara Crampton, une actrice dont la carrière se partage entre soaps opera (Les feux de l’amour et Amour, gloire et beauté…) et films d’horreur (We Are Still Here).
Si le rire empêche d’avoir peur il n’empêche pas le malaise et n’enlève rien à la dimension infernale des dernières scènes du film ni le tragique de son dénouement. Re-Animator est de ces films des années 80 qui font plaisir à voir et revoir. Il n'est pas grave d'éprouver devant cette réussite, d'autant plus marquante qu'il s'agit d'un coup d'essai, un brin de nostalgie pour cette époque. Et bien heureux celui qui découvre pour la première fois Re-Animator.
R.V.
P.S. : Re-Animator c'est aussi une suite Re-Animator 2 : The Bride of Re-Animator. (chronique à venir)