Terreur à l'hôpital central
Le tueur qui n’aimait pas
les femmes
Un slasher 80’s de plus ? Oui.
Un autre clone d’Halloween et de Vendredi 13 ? Et bien non en fait.
Un autre clone d’Halloween et de Vendredi 13 ? Et bien non en fait.
Titre original : Visiting Hours
Réalisateur : Jean-Claude Lord Scénario : Brian Taggert Distribution :
Pays : Canada |
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Synopsis : La journaliste Deborah Ballin s’attire bien malgré elle la haine de Colt Hawker, un tueur psychopathe radicalement misogyne, après avoir pris la défense d’une femme violentée par son mari. Le tueur se lance sur la piste de sa victime et tuera quiconque se trouve sur son chemin.
En 1980, lorsque commence le tournage de Terreur à l’hôpital central (Visiting Hours), le réalisateur canadien Jean-Claude Lord est un peu dans le creux de la vague mais son ami le producteur Pierre David, qu’on retrouve derrière Chromosome 3 de David Cronenberg, lui apporte un projet de film d’horreur. L’horreur était déjà un genre qui avait fait preuve de son fort potentiel en matière de rentabilité financière, budget modeste et grosses rentrées d’argents possibles, avec en ce début d’années 80 une domination incontesté du slasher, le petit frère américain et pudibond du giallo italien de la décennie précédente. Lord n’est pas un spécialiste du cinéma et d’emblée, dès les premiers instants du film ce qui frappe c’est à quel point le spectateur est loin des clichés les plus éculés du slasher. Pas de lycéens ou d’étudiants sauvagement massacrés par un croque-mitaine à peine humain mais une femme dans la cinquantaine, la journaliste Deborah Ballin (l’actrice américaine Lee Grant vue dans Damien la malédiction II, Dans la chaleur de la nuit…) poursuivie par un tueur en série tous ce qu’il y a de plus humain et mortel.
Ce tueur, l’antagoniste du film, c’est Colt Hawker qui depuis un incident survenu dans son enfance voue une haine tenace et meurtrière à la gent féminine. Le personnage est joué par un Michael Ironside (Straship Troopers et Total Recall pour Verhoeven) qui n’avait pas fini de prêter sa tronche à des personnages de méchants. Et même sans masque ou maquillage façon grand brûlé Colt Hawker est un tueur psychopathe qui suscite le genre de malaise qu’on n’éprouve pas pour un Michael Myers ou un Jason Voorhees si peu humain qu’il est facile de ne voir en eux que des figures purement malfaisantes, des incarnations du Mal. L’humanisation du tueur ne le rend pas plus sympathique, il n’y a pas grand-chose de positifs chez Hawker, mais accroit le malaise.
Certaines critiques pointes du doigt la misogynie du slasher, une critique assez largement injustifiée, mais dans ce Terreur à l’hôpital la misogynie du tueur est porté à un rare niveau d’intensité. La moindre de ses interactions avec une femme à l’écran transpire la haine. Colt Hawker est incapable d’avoir ne serait-ce qu’une relation un minimum civile avec une femme et on ne parle pas que de celles qu’il tue mais aussi d’une serveuse dans un diner ou d’une voisine. Et puis il y a celle qu’il agresse pour ce qui est de loin la seule vraie scène choc du film.
En complément au binôme formé par les personnages de Ballin et Hawker, qui renvoie à la dualité fondamentale du slasher qui oppose une last girl à un bogeyman, on retrouve deux seconds rôles plus ou moins développés. Le moins fouillé c’est celui de William Shattner, le capitaine Kirk de Star Treck, qui est très loin de jouer le héros dans ce film, il est l’incarnation d’une sorte de lâcheté masculine qui n’est pas des plus flatteuses. En comparaison l’infirmière Sheila Monroe (Linda Purl), l’autre personnage secondaire important du film, a droit à un développement plus profond de son personnage.
Econome en effets visuels la réalisation développe tout au long du film une folie par l’image qui passe par un usage intensif de la caméra portée, des cadrages bizarres (des plongées et des contre-plongées, des séquences filmées à hauteur des jambes…), des gros plans sur les visages et les mains. Autre effet de réalisation le refus quasi-systématique de centrer l’image sur le personnage principal du plan. Ces choix participent à l’étrangeté d’un long métrage qui paraît chercher une voie bien à lui entre naturalisme et fantastique. Ou pour mieux tourner ça, qui insuffle par son langage cinématographique une dimension fantastique absente du scénario.
Si Terreur à l’hôpital central laisse de côté certains des éléments qui étaient en train de devenir des archétypes du slasher, il se rattache bien au genre dans son fétichisme de l’arme blanche qui est plus que jamais un substitut phallique. Thriller héritier des œuvres d’Alfred Hitchcock autant que de films des années 70 qui revisitaient l’œuvre du maître, ce film annonce ces longs métrages des années 90 qui dans la foulée du succès public rencontré par Le silence des agneaux mirent aux prises une femme dans la trentaine ou la quarantaine à un tueur psychopathe.
R.V.