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Voir Gêne et mourir
Sous le titre français Les rendez-vous de Satan se cache un Giallo quasi archétypal qui ne parle pas du Diable, d’occultisme ou de sorcellerie et qui est l'unique incursion dans le genre de son réalisateur
Titre original : Perché quelle strane gocce di sangue sul corpo di Jennifer ?
Réalisateur : Giuliano Carnimeo Scénario : Ernesto Gastaldi Distribution :
Pays : Italie Synopsis : Jennifer et son ami Marylin, deux modèles, emménagent à la demande de l’architecte Andrea Antinotti dans un immeuble dont il est le propriétaire et où deux meurtres viennent d’avoir lieu. Jennifer et Andrea deviennent amant alors que la passé de la jeune femme la rattrape et que l’assassin se déchaîne dans l’immeuble et ses environs. |
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Sorti en Italie pendant l’été 1972 sous le titre à rallonge mais bien dans l’air du temps Perché quelle strane gocce di sangue sul corpo di Jennifer (soit à peu près Pourquoi ces gouttes de sang sur le corps de Jennifer ?), un vers emprunté au barde mythique Ossian, à en croire le commissaire Enci (Giampiero Albertini), ce Giallo, unique incursion du réalisateur Giuliano Carnimeo, jusque-là connu pour ses Westerns, rencontra un certain succès dans son pays d’origine mais dû attendre 1979 pour être exploité en France.
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Et c’est un nouvel épisode de la série Les mystères des titres français, car on a beau chercher s’il y a bien des rendez-vous, au moins deux (celui qui ouvre et celui qui conclue le film) pas l’ombre de la queue de Satan dans ce film. Alors forcément on se perd en conjecture, le titre cherchait-il à capitaliser sur le succès des films d’horreurs surnaturels et plus ou moins démoniaques tournés outre Atlantique ? Était-ce un moyen d’attirer le chaland en lui faisant miroiter un film dans le goût de L’exorciste ou de La malédiction ? Si oui c’était parfaitement mal venu tant le film de Carnimeo est loin de ce genre de production états-uniennes.
Les rendez-vous de Satan est presque un Giallo à l’état pur même si parfois sa forme entre en légère dissonance avec les canons visuelles du genre. C’est néanmoins indéniablement l’un de ces Thrillers tournés en Italie au début des années 70 qui voit un tueur en série assassiné, le plus souvent à l’arme blanche, une tripotée de victimes, souvent des femmes, qui sont des menaces pour l’ordre bourgeois et la morale judéo-chrétienne.
Le long métrage crie si fort qu’il est un Giallo qu’on y retrouve une bonne partie des responsables de L’étrange vice de Mme Wardh a commencé par le scénariste, Ernesto Gastaldi et le couple d’acteurs Edwige Fenech (Jennifer Landsbury) et George Hilton (Andrea Antinotti) une équipe ressemblée par le producteur Luciano Martino qui souhaitait rééditer la réussite de ses précédents Gialli, Toutes les couleurs du vice, avec Hilton et Fenech, ou La queue du scorpion avec, avec Hilton et Anita Strindberg (Le venin de la peur, Ton vice est une chambre close dont moi seul est la clé…).
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George Hilton retrouve ici son rôle de bellâtre innocent avec une tête de coupable ou d’assassin avec une tête de victime on ne sait plus trop. L’acteur sait y faire dans ce registre tout en ambiguïté à la fois charmeur et inquiétant dans tous les cas moralement trouble. Dans ce film on voit notamment son personnage inviter une femme qui lui plait, la belle Jennifer, à emménager dans l’appartement d’une autre femme, Mizar Harrington (interprétée par Carla Brait, Torso), qui vient de s’y faire assassiner. Quant à Edwige Fenech elle retrouve son rôle de beauté victime de forces qui la dépassent. Elle est ici plus passive que jamais et ce n’est clairement pas la partie du film qui a le mieux vieilli.
Le film développe un ton un peu presque comique par moment qui fait un contrepoint à l’extrême sérieux des deux protagonistes principaux. Ces embardés rappellent celles des 4 mouches de velours gris de Dario Argento sorti l’année précédente avec Bud Spencer en Diomede, un clochard céleste, et notre Jean-Pierre Marielle national dans la peau d’un détective homo. Le personnage de Marylin Ricci (Paola Quattrini) est un pendant léger au personnage sombre de Jennifer. Redi, l’assistant du commissaire, de par son côté gaffeur et plus ou moins à côté de la plaque contribue lui aussi à alléger un film à la mécanique peut-être trop bien huilé. Le commissaire Enci est lui-même un personnage curieux qui collectionne les timbres et comme souvent dans les Gialli laissent entrevoir une police si ce n’est incapable du moins largement dépassée par les crimes commis par le mystérieux tueur.
Ce n’est pas Les rendez de Satan qui convaincra ceux qui n’aiment pas le genre du Giallo qu’ils devraient s’y mettre et pourtant le film n’est pas qu’un exercice de style, le travail d’un tâcheron qui devait se plier à un cahier des charges. La réalisation d’Ernesto Carnimeo tranche avec ce que le genre a de plus baroque et démonstratif. La photographie, signée Stelvio Massi, est volontairement terne, à l’image d’une ville de Gêne filmée entre l’automne et l’hiver 1971. Une photographie délibérément terne qui met en valeur certaine tache de couleur comme le bijou rouge qui orne le front de Carla Brait lors de ça scène de danse érotique/lutte (oui ça existe et on ne remerciera jamais assez le cinéma d’exploitation italien pour ce genre de scène). Loin du légendaire Dario Argento, qui allait très loin dans l’explosion de couleur et les plans improbables Carnimeo n’en néglige pas pour autant de réaliser certains plans un peu fous et hallucinés avec une prédilection pour les images reflétées et quelques cadrages imaginatifs.
Certes ce n’est pas une œuvre révolutionnaire qui a bouleversé le Giallo mais elle ravira les amateurs du genre et peut offrir une bonne entrée en matière pour qui souhaite s’aventurer dans les parages violents et sexy du Thriller sanglant et horrifique à l’italienne. Les rendez-vous de Satan évoque non sans ironie grâce au personnage du photographe de pub, qu’il est ici question de sexe (et singulièrement d’homosexualité féminine) et que le sexe fait vendre. Le Giallo en général, et celui-ci ne fait pas exception, répond à deux contraintes celle commerciale d’aller toujours plus loin dans la représentation de la violence comme du sexe et celle de ne pas tomber sous le coup de la censure.
R.V.
Pour plus de gialli voir cette sélection qui n’est pas exhaustive, loin de là :
Chats rouges dans un labyrinthe de verre – Je suis vivant ! - L’Etrange vice de Madame Wardh – L’Eventreur de New York – La Lame infernale – La Longue nuit de l’exorcisme – La Queue du scorpion – Le Tueur à L’orchidée – Le Venin de la peur – Mais qu’avez-vous fait à Solange ? – Nue pour l’assassin – Six Femmes pour l’assassin – Spasmo – Torso – Toutes les couleurs du vice
Chats rouges dans un labyrinthe de verre – Je suis vivant ! - L’Etrange vice de Madame Wardh – L’Eventreur de New York – La Lame infernale – La Longue nuit de l’exorcisme – La Queue du scorpion – Le Tueur à L’orchidée – Le Venin de la peur – Mais qu’avez-vous fait à Solange ? – Nue pour l’assassin – Six Femmes pour l’assassin – Spasmo – Torso – Toutes les couleurs du vice